Vous êtes passionné de comprendre ! Bravo, vous serez éblouis par les théoriciens. Ils vous entraîneront au firmament de leurs théories. Alors que vous pensiez tout savoir de l’œdipe, vous découvrez avec délice qu’il ne s’agit là que d’un ba-ba aussi trivial que les tests psycho de l’été. Selon son obédience, ce brillant praticien vous entraînera dans les arcanes du Nom du père, de l’animus ou de l’identification projective.
Grâce à lui, vous vous préoccuperez du devenir de votre objet petit a, de votre sortie de la position schizo-paranoïde ou de l’interprétation comparée de vos rêves.
Vous ne serez pas seulement patient mais aussi chercheur dans le domaine des biais cognitifs, passionné de programmation neuro-linguistique, adepte du body-scan, des équations, des inversions topologiques. Dans la foulée, le schéma de la sexuation vous offrira un merveilleux doudou mental à même de faire face à toutes les situations de la vie, même – et surtout !- les plus inattendues.
Comme « ça se passe dans la tête », vous êtes persuadé c’est avec le cerveau qu’il faut COMPRENDRE. Sur ce point, il ne vous a jamais démenti ; il le pense aussi.
Pour votre plus grand plaisir à tous deux, ce jeu-là est infini et offre une manière, ma foi, fort distinguée de vaincre l’angoisse.
Décodage
Les psychothérapeutes ne travaillent pas « au pif ».
Pour exercer, il ne suffit pas d’avoir le « feeling », « la sensation de… », ni même d’être empathique
Les théories leur sont essentielles et doivent constituer une part importante de leur formation spécifique (au delà du diplôme de base) et continuée.
Les théories constituent, entre autre, le tiers qui fait en sorte que le thérapeute n’opère pas avec sa seule subjectivité. Au delà de ce qu’il pense, perçoit, il a dû se confronter aux théories, reconnaître les apports de ceux qui l’ont précédé ; il se fait superviser et échange avec ses collègues. Bref, il n’est pas seul, il n’est pas Dieu.
Mais en séance, la théorie reste à l’arrière plan.
Il serait réducteur que de vouloir faire entrer les dires du patient dans un schéma théorique, tout comme il est inutile de partager ses théories avec le patient ; cela ne peut que le mettre sur une mauvaise voie : celle de croire qu’une psychothérapie relèverait de la compréhension. Comprendre ? Jamais l’inconscient ne se laisse prendre.
[Reprise d’une série d’articles que j’avais rédigé en 2014 pour un site fermé depuis : Les consolateurs | Les muets | Les prescripteurs | Les diplômés | Les séducteurs | Les brefs | Les gourous | Les m’as-tu vu ? | Les entraîneurs | Les théoriciens ]